Opération "Dragoon"

Le Débarquement de Provence
Opération " DRAGOON "

PROVENCE : Opération parfaitement préparée , Mission techniquement réussie

Une nouvelle fois , " OVERLORD " avait prouvé les difficultés des largages massifs , malgré l' importance des moyens mis en oeuvre et peut - être à cause d' eux .

Un mois et quelques jours après " OVERLORD " le débarquement de PROVENCE allait montrer qu' il était possible de réussir parfaitement une grande opération aéroportée . Au moins sur le plan technique , car sur les plans stratégique et tactique , la comparaison n' est pas à faire .

Le 29 décembre 1943 , le QG des Forces Alliées adressait au groupe de planification de la VIIème Armée U.S , installé secrètement dans l' Ecole Normale de la BOUZAREAH , dans la banlieue d' ALGER , les instructions concernant l' opération baptisée du nom de code d' " ANVIL " . Il s' agissait , en conjonction avec " OVERLORD " , d' établir une tête de pont en Méditerranée et d' exploiter ensuite en direction de LYON et de VICHY .

Le 23 juin 1944 , le commandement suprême allié prenait la décision finale d' envahir la FRANCE méridionale , et le 28 , l' esquisse de plan était présentée au Commandant Supérieur en Méditerranée .

Un mois plus tard , l' ordre d' opération n ° 1 de la VIIème Armée était signé et donnait ses directives à deux Forces :


- La " Force Rugby " , formée autour de la DAP provisoire de la VIIème Armée , elle devait prendre d' assaut les positions ennemies sur leurs arrières et appuyer l' avance des forces débarquées par mer en neutralisant les installations Allemandes ;


- La " Force Stika " ou 1° Special Service Force , elle devait débarquer avant l' heure " H " en profitant de l' obscurité et neutraliser les défenses Allemandes des Îles du LEVANT et de PORT - CROS . Ultérieurement , après s' être regroupée sur le continent , elle prendrait d' assaut l' Île de PORQUEROLLES .



Le 1er Août , " ANVIL " fut rebaptisée " DRAGOON " . Le Général Robert T . FREDERICK prit le commandement de la DAP provisoire , à qui on donna finalement le nom de 1ère Airbone Task Force ou ABTF .

De son côté , la 9ème Unité d' Eclaireurs s' entraînait minutieusement avec les trois sections de " pathfinders " devant participer à l' opération . La dernière partie du programme comprenait des sauts réels avec matériel complet , des petits groupes de Parachutistes étaient ensuite , largués sur les zones de saut préparées par les " pathfinders " afin d' en vérifier la précision .



A cause du manque de temps et des difficultés de pliage des parachutes , il était impossible à la 1ère ABTF de réaliser une manoeuvre finale en vraie grandeur . La dernière répétition fut conduite en deux phases ;


- Une phase terrestre constituée par un exercice de cadres et de transmission joué en vraie grandeur , avec les personnels prévus pour l' opération et sur un terrain semblable à celui sur lequel devait opérer chaque groupement tactique ;


- Une phase aérienne consistant en un chargement et déchargement de tous les hommes et matériels , tandis que tous les hommes essentiels à l' opération étaient transportés en avions et planeurs sur un itinéraire et selon un horaire identiques à ceux de l' opération réelle .

La 1° Special Service Force , pour sa part , subissait un entraînement amphibie au Centre d' Instruction d' Invasion transféré au printemps 1944 de PORT - AUX - POULES ( ALGERIE ) dans la baie de SALERNE . Dans la nuit du 7 au 8 Août , elle participa à un dernier exercice de débarquement sur les Îles de PONZA et ZANNONA , choisies pour leur ressemblance avec les Îles d' HYERES , avant de faire route vers PROPRIANO ( CORSE ) .

Au moment du décollage nocturne des appareils de transport , tous les préparatifs étaient terminés . Les photos des zones de mise à terre étaient excellentes et les obliques avaient permis de déceler des perches anti - planeurs plantées en grand nombre sur les zones d' atterrissage .

La Force Sitka avait quitté PROPRIANO la veille , à 11 h 30 , et les falaises des Îles apparurent juste après le crépuscule . L' assaut devait être effectué par le large , les sites ayant été choisis par le Colonel WALKER en dépit des conseils de prudence Français . L ' excellent entraînement des hommes de la Force leur permit , après avoir débarqué vers 23 heures par bateaux de 10 hommes , de surprendre par la face la plus abrupte et dans l' obscurité , les défenseurs Allemands appartenant au 1er bataillon du 917ème RI de la 242ème Division Allemande , pourtant en alerte . Les combats cessèrent sur l' Île du LEVANT , prise d' assaut par les 2ème et 3ème Régiments , le 15 , à 22 heures 34 . Sur PORT - CROS , en revanche , le 1er Régiment , bientôt renforcé par un bataillon du 3ème rencontrait quelques difficultés , qui ne purent être surmontées que le 17 dans la matinée après l' intervention des pièces de 380 mm du cuirassé " RAMILLIES " . Les éléments Américains furent alors relevés par une compagnie Française chargée de protéger les radars en cours d' installation .

La mission de la Force Rugby était la suivante ;


- Débarquer sur les hauteurs Nord et Est du MUY , et Nord de GRIMAUD ;
- Interdire tout mouvement vers la tête de pont maritime à partir de l' Ouest et du Nord - Ouest : c' était la mission prioritaire ;
- Nettoyer le MUY et le secteur environnant en vue de protéger le débarquement ultérieur des Forces planées le jour " J " avant la nuit .
Après contact avec le 6ème Corps , elle passerait aux ordres de celui - ci . Le saut devait être effectué juste avant le lever du jour et le premier ravitaillement par air était prévu tard dans l' après - midi . Des navires - balises , postés le long de l' itinéraire , faciliteraient la navigation des appareils de transport qui allumeraient à 60 kilomètres de la côte Française des lampes oranges de reconnaissance .

L' Opération fut précédée par une diversion - réussie - qui créa l' illusion d' une opération aéroportée , avec largage de pantins de caoutchouc munis de dispositifs pyrotechniques , dans la région entre TOULON et la CIOTAT .
Les " pathfinders " atterrirent quelques minutes avant l' horaire prévu , entre 3 h 23 et 3 h 34 . Seule , l' équipe de la 2ème Brigade atterrit sur sa zone ; l' équipe du 509ème Groupement sauta prématurément à l' Est du MUY et ne rejoignit sa zone que dans l' après - midi , à temps toutefois pour aider de ses moyens de guidage ( Euréka - Rebecca et radio - balise ) le poser d' une vague de planeurs . quant à la section 517ème Groupement , elle se perdit complètement à une vingtaine de kilomètres de sa zone de mise à terre . Le gros des forces parachutées , une formation de 396 appareils volant en 9 vagues , poursuivait sa route à 800 kilomètres sans incident . Guidée par les radios - balises installées sur les aérodromes de départ , à la pointe Nord - Est de l' Île d' ELBE , sur l' Île de GIROGLIA et sur un navire sémaphore ( portée : 80 kilomètres ) la formation atteignit la côte sans avoir essuyé le feu , ennemi ou ami . Toute l' EUROPE occidentale était alors couverte par une épaisse couche de brouillard . Les prévisions se confirmaient : temps clair jusqu' à l'Île d' ELBE , visibilité décroissante sur la zone de mise à terre , à peine 800 mètres au lieu des 3000 mètres prévus .

Le largage fut néanmoins un succès . 60 % des parachutistes atterrirent sur leur zone , ou à proximité : DZ " A " , plate , champs cultivés , très praticables vers TRANS- EN - PROVENCE pour le 517ème à 4 H 35 - DZ " O " , identique , près de LA MOTTE , pour la 2ème Brigade à 5 H 10 - DZ " C " , coupée , rocailleuse vers le MUY , pour le 509ème Groupement à 4 H 30 .

Environ 120 appareils avaient manqué les DZ . Les groupes de saut de 20 appareils , partis au signal rouge , atterrirent dans la presqu ' île de SAINT - TROPEZ . Des éléments du 509ème et la moitié du 463ème Bataillon d' artillerie se trouvaient ainsi isolés et pris sous le feu des navires alliés . Après s' être ressaisis et en coopération avec les partisans Français , ils détruisirent cinq canons , capturèrent intactes une batterie de DCA et deux batteries côtières . La garnison de la citadelle de SAINT - TROPEZ , forte de 240 hommes , succomba à 18 H 30 sous les yeux des troupes de la 3ème Division débarquées par mer .

Prévue à 8 heures , la première vague de planneurs , retardée par le brouillard , ne se posa sur la Landing Zone " O " qu' à 9 H 30 . La seizième vague déposait le 1er Bataillon du 551ème sur la LZ " A " à 18 heures . Les " asperges de ROMMEL " , peu profondément enfoncées dans le sol , loin de constituer un obstacle , avaient au contraire permis de freiner l' élan des planeurs . Les pertes ( 113 Hommes ) étaient très faibles .

En fin d' après - midi du 15 , toute la Force Rugby avait été mise à terre . A 18 heures , le PC ( Poste de Commandement ) était installé définitivement et tous les contacts établis . Le soir , 103 prisonniers avaient été faits et les villages du MITAN , de LA MOTTE , de CLASTRON et des SERRES étaient occupés .

A 16 heures 35 une contre - attaque Allemande sur les ARCS avait été repoussée par le 517ème . Au MUY , qui aurait dû être à la charge de la 2ème Brigade , l' absence du 5ème Bataillon ne permit que de bloquer les abords de la localité et de couvrir l' attaque du 550ème , le 16 au matin . Le 550ème n' atteignit son objectif qu' à 15 heures , appuyé par les mortiers " chimiques " de 106 mm , arrivés par planeurs . Le 16 au soir , toute résistance ennemie cessa dans la zone de l' objectif . A 19 heures 45 , le contact fut établi avec la 45ème Division débarquée par mer , 493 prisonniers avaient été faits .



Le 17 . à 7 heures , la villa " GLADYS " , dans le centre de DRAGUIGNAN , qui abritait l' Etat - Major du 62ème Corps d' Armée Allemand , fut prise d' assaut par la 2ème Compagnie du 551ème . Sous les coups de mortiers et de bazoukas , le Général NEULING se rendit . La mission confiée le jour " J " au 2ème Bataillon du 517ème Para était remplie .

Les missions confiées au Général FREDERICK avaient été parfaitement remplies dans les délais fixés . Dans les derniers jours d' Août et les premiers jours de Septembre , la ABTF libérait CANNES , GRASSE , NICE et MENTON avant d' être dissoute et de ventiler ses éléments Américains dans les DAP ( Divisions Aéroportées ) rassemblées dans l' Est de la FRANCE et ses éléments Canadiens au sein du 1er Bataillon Canadien